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Le Mystère des roches de Kador (Léonce Perret 1912) Histoire du cinéma #37

Non seulement le cinéma n'est jamais en retard sur son temps, mais il est capable de porter très vite à l'écran ce qui fait la spécificité de son époque sans être tributaire d'une histoire et d'une avant-garde obligée. 

Même si Freud a déjà publié la plupart de ses textes les plus importants, quasiment aucun d'entre eux n'est disponible en français lorsque Léonce Perret (1880-1935) a l'idée géniale en 1912 d'associer le cinéma et la psychanalyse. C'est dire si les théories freudiennes se répandent rapidement au point qu'un réalisateur alors peu connu parie à la fois sur l'intérêt et la compréhension du public en introduisant pour la première fois au cinéma une thématique propre à la psychanalyse. Certes, le cinéma s'est toujours emparé de l'esprit et des inventions de chaque époque et le film de Léonce Perret, le Mystère des roches de Kador  ne fait pas exception, mais c'était là faire preuve d'une originalité considérable.

En effet, même si l'époque était friande d'hypnose, de magnétisme et de sciences occultes, Léonce Perret ne choisit pas de céder à la facilité en montrant un exorcisme, un homme hypnotisé sous l'emprise du mal ou un fantôme terrorisant une jeune fille à l'occasion de sa première séance de spiritisme. Non, l'idée remarquable de Perret est que le cinéma a une force de suggestion subliminale et qu'il peut donc faire surgir sous les yeux du patient le souvenir traumatique enfoui et refoulé. Il s'agira alors ni plus ni moins que de montrer au cinéma une thérapie par le cinéma. Bel hommage rendu par l'art du temps et de l'image à la théorie freudienne qui est une théorie des rapports entre temps et images. Il est désormais bien évident que le cinéma et la psychanalyse ont des choses à se dire, de Léonce Perret à David Lynch, en passant par Hitchcock.   

Le cinéma peut en effet montrer des images enfouies du passé en les recréant ; il est l'art même de la réminiscence en nous montrant des images qui ont pu être les nôtres à une autre époque de notre moi, il nous permet d'accéder à des souvenirs de tous les doubles de nous-mêmes. 

Léonce Perret nous montrera donc (autre innovation de ce film) comment se construit un film, ce qu'est un acteur, ce qu'est une doublure, suffisamment ressemblante pour que la jeune femme traumatisée se prenne pour elle même. Pouvoir de suggestion, de réminiscence, de catharsis et d'identification, voilà ce qu'a très bien vu Léonce Perret.

Le cinéma n'est pas un art comme les autres, il est l'art de la conscience et de l'inconscient. 

La scène du film où le cinéma est utilisé pour présenter à la patiente le souvenir traumatique refoulé. (On appréciera le travail photographique remarquable de Georges Specht) :

https://youtu.be/gcTeSKELyuw?si=8prq4VGP7K_vOoMi  (on prendra soin de couper le son)

Le film dans son intégralité :

https://youtu.be/2YzECX28t8I?si=Cz4k4_iehTj7bzId   (idem)

 

 

 

 

 

 

 

Le Mystère des roches de Kador (Léonce Perret 1912) Histoire du cinéma #37
Tag(s) : #Cinéma, #Psychanalyse
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