Ignazio Affanni (1828-1889) -peintre

Ignazio Affani est un peintre italien de la région de Parme qui est passé par Firenze afin de parfaire sa formation. En peignant en 1862, à l'âge de 34 ans, sa "Rebecca se réjouissant des bijoux que lui a adressés Isaac", Affanni a peint la Rebecca la plus sublime de toute l'histoire de la peinture.

Dans la Genèse, Rebecca est la première alliée de Jehova, celle qui donnera une descendance à Abraham en épousant son fils Isaac, et en mettant au monde Jacob. Rebecca est ainsi la première matriarche du peuple de Jacob. Pour parvenir à ses fins, elle usurpera la bénédiction d'Isaac, qui revenait de droit à Esaü, l'aîné de ses deux fils jumeaux, au profit du cadet Jacob, qui avait sa préférence...

Rebecca est une femme aussi belle que courageuse, intelligente et rusée, et qui connaît son destin. Rebecca est une proche parente d'Abraham, elle est membre de l'ancien clan du patriarche. Elle sait que ce vieux fou d'Abraham accomplira la prophétie de la génération du peuple élu. Elle rêve d'être appelée par Jehovah pour accomplir son dessein. Elle rêve d'engendrer le peuple juif. Sa jeunesse, sa beauté, et ses choix ( rapides et déterminés) relèvent d'un désir et d'une excitation divine. Le destin de Rebecca, c'est sa passion. Elle se sait appelée, elle répondra. 

Aff​anni est le seul peintre à avoir compris que l'érotisme de Rebecca n'est autre que la présence en elle de la Grâce divine: la grâce de cette main délicatement suspendue au-dessus d'un sein dénudé

Abraham est déjà vieilli lorsqu'il se préoccupe de trouver une femme pour son fils Isaac, lequel ne se remet pas de la perte de sa mère. Il faut que son vieux père en fasse un homme, en tous cas un géniteur, s'il veut s'assurer une progéniture, conformément à la prophétie...

Tout semble reposer sur les qualités de la femme qui épousera Isaac. Cette femme devra avoir une foi profonde en Jehova, elle devra être désirée d'Isaac ( elle demeurera longtemps infécondée), il lui faudra faire preuve d'un courage exceptionnel et d'une intelligence peu commune.

Rebecca est prête à épouser son destin: aussi sera-t-elle immédiatement reconnue par le plus vénérable serviteur d'Abraham, celui qui a été dépêché auprès de l'ancienne tribu du maître, afin de trouver la femme que la prophétie a annoncé pour épouser Isaac...

En s'approchant d'un puits, le serviteur d'Abraham remarque une femme d'une beauté et d'une vivacité exceptionnelles. Rebecca s'acquitte courageusement de son premier devoir en matière d'hospitalité: elle offre non seulement l'eau de sa jarre au vieil homme, mais s'occupe également d'abreuver les dix chameaux qui composent la caravane du messager d'Abraham, ce qui témoigne d'une vigueur et d'une volonté à toute épreuve. Sur le tableau d'Affanni, la jarre imposante, tenue par la main droite de Rebecca, nous rappelle que l'attachement de cette jeune femme à son labeur ( c'est-à-dire à son destin) n'est pas un fardeau. Rebecca tient ainsi dans ses deux mains la Grâce et le Devoir.

Les cadeaux du serviteur feront le reste: une bague et deux bracelets en or attestent de l'authenticité et de la noblesse du messager. C'est bien elle qu'on est venu chercher. Ces bracelets parlent d'or et de terre promise, de pouvoirs et de descendance: ils sont les symboles du rôle que Rebecca aura à jouer dans l'histoire du peuple juif. Rebecca n'a plus d'yeux que pour ses bijoux qui lui permettent de se réjouir d'être l'élue. Mais ​sans doute en est-il ainsi pour toute femme depuis la nuit des temps: être l'élue d'un homme, d'une famille, d'un clan, et en recevoir les attributs, l'aura et les pouvoirs... Mais Rebecca est l'élue d'un Dieu.

Quant à l'homme Isaac, qui n'est pas en capacité de prendre femme sans l'intervention de son père, et qui mettra des années à féconder sa femme, il sera la dupe d'une tromperie au sujet de la bénédiction de son fils aîné, c'est à dire d'une usurpation d'identité qui conduira Esaü à être spolié de son héritage. En effet, Rebecca aura deux fils jumeaux: le premier à s'être présenté à la vie, Esaû, ne montrera aucune appétence particulière pour la parole prophétique, tandis que le cadet Jacob, le préféré de sa mère, accomplira la destinée voulue par Jehova. Ainsi, au moment de la bénédiction donnée par son père, Jacob lui est présenté travesti en son frère. Supercherie inventive mais surtout symbolique, qui dit bien que Rebecca a choisi à son tour son élu. Le mariage d'Isaac et de Rebecca est donc d'abord celui de Rebecca avec son Dieu, qui fait suite au pacte d'Abraham et de Jehova. Dans le tableau d'Affanni, les attributs de Rebecca sont ceux que Dieu a mis entre ses mains afin d'établir la progéniture d'Abraham et de Jacob.

Vous qui regardez ce tableau et qui, sans doute à ce jour, ne vous êtes jamais sentis appelés par aucune prophétie, contemplez le désir et la beauté de cette foi, et comprenez qu'il y a peu de place en cette terre pour un Isaac et encore moins pour un Esaü.

La femme Rebecca est l'avenir, non de l'homme, mais de Dieu.